Délais et échéancier des instances devant le Tribunal


Janvier 2019

DIRECTIVE DE PRATIQUE CONCERNANT LES DÉLAIS ET ÉCHÉANCIER DES INSTANCES DEVANT LE TRIBUNAL

L’objet de la présente directive de pratique est de guider les parties et les avocats qui comparaissent devant le Tribunal de la concurrence au sujet des délais qui devront normalement être suivis dans les instances devant le Tribunal. La présente directive de pratique vise aussi à orienter les parties et les avocats au sujet de l’établissement d’échéanciers pour les principales étapes de communication préalable et de préparation de l’audience. Par ailleurs, à la suite de consultations avec le commissaire de la concurrence (« Commissaire ») et avec l’Association du Barreau canadien menées dans le cadre du Comité de liaison entre le Tribunal et le Barreau, le Tribunal jouera un rôle plus actif dans la gestion de ses instances. Ce rôle englobe expressément l’examen des propositions d’ordonnances établissant le calendrier, y compris celles présentées avec le consentement de toutes les parties.

La présente directive de pratique est établie dans la poursuite de l’objectif général du Tribunal de continuer à améliorer l’efficacité et l’efficience de ses instances.

Délais

Le Tribunal considère qu’une période de 10 à 16 mois entre le dépôt d’un avis de demande et le début de l’audience sur le fond constitue généralement un délai raisonnable pour ses instances, sous réserve de la nature particulière de chaque demande. Le Tribunal s’attend à ce que les calendriers proposés par les parties pour le règlement d’une demande établissent généralement un échéancier qui respecte ce délai. Cet échéancier devrait aussi définir le déroulement des différentes étapes de communication préalable et de préparation de l’audience de l’instance afin qu’elles soient complétées à l’intérieur de cette période de temps. Si une partie souhaite s’écarter de ce délai, elle devra présenter les motifs de sa demande au Tribunal le plus rapidement possible.

Par souci de clarté, le Tribunal souligne que le délai général de 10 à 16 mois ne devrait pas être considéré comme fixe. En effet, une certaine souplesse est envisagée, et le délai pourra varier ou être prolongé selon le contexte, le niveau d’urgence ou les circonstances propres à chaque affaire. De plus, les propres exigences posées par la planification des activités du Tribunal pourraient mener au prolongement du délai.

Le Tribunal note que certains facteurs ayant déjà donné lieu à une prorogation des délais dans le passé incluent notamment les requêtes en autorisation d’intervenir, les requêtes en rejet sommaire ou en procédure sommaire, les requêtes contestant la compétence ratione materiae ou ratione personae du Tribunal, les requêtes contestant des allégations de privilège et les requêtes demandant la suspension d’une instance du Tribunal en attendant l’issue d’un appel sur une requête préliminaire ou une question connexe. Dans la plupart des cas, le Tribunal évaluera aussi si les calendriers proposés sont réalistes et réalisables pour les parties impliquées. Le Tribunal souligne toutefois que la présence de l’une ou de plusieurs de ces circonstances ne signifie pas nécessairement qu’une prorogation sera accordée. La question de proroger ou non les délais fera l’objet d’un examen au cas par cas.

Le Tribunal pourra émettre des directives et rendre des ordonnances qui ne refléteront pas toujours le calendrier proposé par les parties, même dans le cas d’une proposition faite de consentement, si elle se situe en dehors du délai général de 10 à 16 mois et si le Tribunal estime que le calendrier proposé est contraire à son mandat législatif conféré par le paragraphe 9(2) de la Loi sur le Tribunal de la concurrence, LRC 1985, ch 19 (2e supp), à savoir d’agir sans formalisme et en procédure expéditive, dans la mesure où les circonstances et l’équité le permettent.

Communication préalable et étapes préparatoires à l’audience

Dans la préparation des échéanciers qu’ils proposeront pour le règlement d’une demande, les parties et les avocats devraient tenir compte des étapes énumérées ci-dessous lorsqu’ils détermineront comment répartir le mieux possible le temps imparti pour réaliser les diverses étapes de communication préalable et de préparation de l’audience, à l’intérieur de la période de temps précitée :

  1. Communication préalable des documents :
    1. signification d’affidavits de documents;
    2. requêtes découlant des affidavits de documents et des productions;
    3. requêtes découlant d’allégations de privilège et/ou de désignations de confidentialité;
  2. Communication préalable orale :
    1. interrogatoires préalables;
    2. requêtes découlant des interrogatoires préalables, des réponses aux engagements pris ou des rejets;
  3. Processus de préparation de l’audience :
    1. signification et/ou dépôt des documents sur lesquels une partie entend se fonder, des déclarations de témoins ordinaires et des rapports d’expert;
    2. requêtes en procédure sommaire;
    3. requêtes découlant d’une renonciation à un privilège;
    4. demandes de reconnaissance;
    5. requêtes relatives à la preuve (documents sur lesquels une partie entend se fonder, déclarations de témoins ordinaires et rapports d’expert).

Les parties sont aussi encouragées à échanger leurs plans de communication préalable, lesquels devraient généralement : 1) identifier et prioriser les principaux sujets, dépositaires, types de documents, échéances pertinentes et autres paramètres qui encadreront la production des documents pertinents; 2) tenir compte du volume anticipé de documents, des coûts à anticiper et des ressources nécessaires pour rechercher et examiner les documents afin d’en établir la pertinence, ainsi que de l’importance et de la complexité des questions; 3) identifier les personnes susceptibles d’être présentes aux interrogatoires préalables et inclure des renseignements sur le moment et la durée des interrogatoires; et 4) prioriser les étapes à franchir et examiner s’il convient d’adopter une approche échelonnée.

Les étapes précitées de communication préalable et de préparation de l’audience seront généralement définies dans les ordonnances établissant le calendrier qui seront rendues par le Tribunal. Une liste plus complète des étapes usuelles pour la communication préalable et la préparation de l’audience est fournie à l’Annexe A. Outre les conférences de gestion de l’instance déjà mentionnées à l’Annexe A, le/la juge responsable de la gestion de l’instance dans chaque affaire sera disponible pour la tenue d’autres conférences de gestion de l’instance si les parties le demandent ou si les circonstances le rendent nécessaire.

Approche en matière de gestion de l’instance

Tout au long des étapes de communication préalable et de préparation de l’audience, le Tribunal joue un rôle actif dans la planification et la gestion de ses instances.

Sur la base de son expérience dans des instances récentes, le Tribunal fait les observations suivantes. En ce qui concerne le processus de communication préalable des documents, le délai accordé pour la signification des affidavits de documents est généralement de quatre (4) à six (6) mois suivant le dépôt de l’avis de demande. Le Tribunal considère que, dans de nombreuses instances, les affidavits de documents pourraient et devraient être signifiés plus tôt et à une date plus rapprochée de la date de la clôture de la procédure écrite. Le Tribunal estime qu’une période de trois (3) mois suivant la clôture de la procédure écrite devrait normalement suffire pour la signification des affidavits de documents. À cet égard, le principe de la proportionnalité doit s’appliquer pour établir la portée de la communication préalable des documents. Réduire la durée de la période pour la signification des affidavits de documents laisserait plus de temps pour examiner les requêtes relatives aux affidavits de documents et aux productions, ainsi que les requêtes découlant d’allégations de privilège et/ou de désignations de confidentialité. Bien que la situation puisse varier selon chaque affaire particulière, le Tribunal observe néanmoins que, pour ce qui est du/de la Commissaire, il/elle sera largement familier avec la preuve. Le Tribunal s’attendrait donc à ce que le/la Commissaire soit généralement en mesure de préparer son affidavit de documents dans les délais précités. Il en va de même pour les défendeurs qui auront eu des échanges avec le/la Commissaire avant le dépôt de la demande.

Concernant les interrogatoires préalables, afin de faciliter le processus et réduire les conséquences défavorables des longs délais associés aux requêtes en communication préalable, le Tribunal s’assurera de la disponibilité d’un/une juge, en personne ou par téléconférence, pour trancher les « objections sur place » soulevées lors d’un interrogatoire préalable.

Le Tribunal adopte aussi certains paramètres et restrictions associés aux interrogatoires préalables établis dans le document de la Cour fédérale intitulé Avis aux parties et à la communauté juridique  La gestion d’instance : assurer la proportionnalité dans les litiges complexes en cour fédérale. Ces paramètres et restrictions s’appliquent à tous les interrogatoires préalables:

  • Aucune requête en rejet ne sera autorisée avant la fin des interrogatoires préalables. Cependant, tel que mentionné plus haut, un/une juge du Tribunal pourra trancher des « objections sur place » lorsque les circonstances le justifient;
  • Le temps consacré aux requêtes en rejet sera limité à une (1) heure par journée d’interrogatoire préalable du représentant de chaque partie;
  • Les parties n’ayant pas gain de cause ou les parties déraisonnables pourront se voir imposer d’importantes sanctions sous forme de dépens;
  • Les questions devraient être répondues à moins qu’elles ne soient manifestement irrégulières ou qu’elles nécessitent la divulgation d’une communication privilégiée. Dans toutes les autres situations, les questions faisant l’objet d’une objection devront tout de même être répondues sous réserve de l’objection, et les motifs de l’objection seront notés au dossier.

Le Tribunal s’attend aussi à ce que, au cours des interrogatoires préalables, les avocats ne prennent des questions « en délibéré » qu’à titre exceptionnel, et que le nombre de questions ainsi prises en délibéré soit de ce fait limité.

Pour ce qui est des processus de préparation de l’audience, le Tribunal précise que les délais prescrits dans les Règles du Tribunal de la concurrence, DORS/2008-141 (« Règles ») pour la signification des déclarations de témoins ordinaires, la liste des documents sur lesquels une partie entend se fonder et les rapports d’expert (c’est-à-dire 60 jours avant l’audience pour le demandeur, 30 jours avant l’audience pour le défendeur, avec réplique du demandeur 15 jours avant l’audience) se sont parfois avérés trop courts lorsqu’une requête relative à la renonciation d’un privilège ou à la preuve est déposée. Le Tribunal estime qu’il est généralement souhaitable que les parties et les avocats prévoient plus de temps pour s’échanger leurs dossiers respectifs, comparativement à ce qui est présentement indiqué dans les Règles.

Le Tribunal souhaite aussi rappeler aux parties et aux avocats que le paragraphe 40(1) des Règles oblige les parties à proposer leur projet de calendrier dans les 14 jours suivant l’expiration du délai prévu pour déposer une réponse. Puisque cette exigence ne semble pas toujours avoir été respectée en pratique, le Tribunal souhaite souligner l’importance de cette règle pour prévenir tout retard dans l’établissement du calendrier pour le règlement d’une demande et pour rendre l’ordonnance établissant le calendrier.

Enfin, le Tribunal aimerait informer les parties et les avocats que, dans ses ordonnances établissant le calendrier, le Tribunal, dans la plupart des cas, obligera maintenant les parties à (i) déposer leurs rapports d’expert au Tribunal au moment où ces rapports sont signifiés aux avocats de la partie adverse, et (ii) fournir les déclarations de leurs témoins ordinaires au Tribunal avant l’audience. Cela donnera plus de temps au Tribunal pour examiner ces documents avant l’audience, et lui permettra d’être mieux préparé et d’être parfois en mesure de résoudre certaines questions plus rapidement. Le Tribunal s’attend aussi à ce que cette mesure contribue généralement à accélérer le déroulement des instances. À cet égard, le Tribunal note les paragraphes 74(3) et 78(2) des Règles, lesquels prévoient que le Tribunal peut lire les déclarations des témoins ordinaires ou les rapports d’expert, respectivement, « [à] moins qu’une des parties ne s’y oppose pour un motif valable ». Aucun aspect de la présente directive de pratique ne doit être interprété comme empêchant une partie de soulever une telle objection.

Pour obtenir de l’aide ou tout renseignement supplémentaire, veuillez communiquer avec le registraire adjoint au (613) 954-0857.

Le juge Denis Gascon
Président


Annexe A — Liste des étapes potentielles de communication préalable et de préparation de l’audience

Avis de demande
Réponse
Réplique
Dépôt des projets de calendrier(s) proposés par les parties
Dépôt de projets d’ordonnance(s) de confidentialité proposés par les parties
Échange des plans de communication préalable
Conférence de gestion de l’instance pour discuter les ordonnances établissant le calendrier et de confidentialité, ainsi que des plans de communication préalable
Signification des affidavits de documents et remise des documents par les parties
Dépôt de toute requête découlant des affidavits de documents et/ou productions, y compris les requêtes contestant des allégations de privilège
Audience sur les requêtes découlant des affidavits de documents, des productions ou des allégations de privilège
Remise de toute autre production émanant des requêtes relatives aux affidavits de documents, productions ou allégations de privilège
Médiation (peut être avant ou après la communication préalable)
Interrogatoires préalables
Délai pour répondre aux questions sur les engagements pris lors de la communication préalable
Dépôt de toute requête découlant des interrogatoires préalables, des réponses aux engagements pris ou des rejets
Audience sur les requêtes découlant des interrogatoires préalables, des réponses aux engagements pris ou des rejets
Interrogatoires préalables supplémentaires, le cas échéant
Conférence de gestion de l’instance sur les étapes de préparation de l’audience et toute autre question préliminaire
Dépôt de toute requête en procédure sommaire
Audience sur les requêtes en procédure sommaire
Signification par le demandeur des documents sur lesquels il entend se fonder et de ses déclarations de témoins ordinaires, et signification et dépôt de ses rapports d’expert
Indication par le demandeur des documents pour lesquels il renonce à un privilège
Signification par le/la Commissaire de sa liste de documents qui font foi de leur contenu sans autre preuve
Dépôt de toute requête pour interrogatoire préalable supplémentaire suivant la renonciation à un privilège
Audience sur les requêtes pour interrogatoire préalable supplémentaire suivant la renonciation à un privilège
Signification par le défendeur des documents sur lesquels il entend se fonder et de ses déclarations de témoins ordinaires, et signification et dépôt de ses rapports d’expert
Délai pour la remise des demandes de reconnaissance
Délai pour la remise de l’énoncé conjoint des faits
Signification par le demandeur des documents en réplique sur lesquels il entend se fonder et de ses déclarations de témoins ordinaires en réplique, et signification et dépôt de ses rapports d’expert en réplique
Dépôt de toute requête relative à la preuve (documents sur lesquels une partie entend se fonder, déclarations de témoins ordinaires et rapports d’expert)
Conférence de gestion de l’instance préalable à l’audience
Délai pour la remise au Tribunal des documents pour utilisation à l’audience (p. ex., déclarations de témoins ordinaires, livres conjoints de documents, et recueils conjoints de jurisprudence et de doctrine). Les parties devront généralement fournir les éléments des interrogatoires préalables qu’elles anticipent de consigner en preuve, en même temps que les documents précités
Délai pour répondre à toute demande de reconnaissance
Audience sur les requêtes relatives à la preuve (documents sur lesquels une partie entend se fonder, déclarations de témoins ordinaires et rapports d’expert)
Audience sur le fond